jeudi 20 mai 2010

Deerhoof @Grillen, Colmar

01/05/2010


J'avais vu Deerhoof à l'époque de la sortie de Reveille, et j'en avais gardé un très bon souvenir, une sorte de pop 60s touchée par le syndrome de Tourette, avec des paroles enfantines et un batteur incroyable.

Un certain nombre d'années plus tard, Deerhoof ont affiné leurs compositions, continuant de les étirer dans tous les sens possibles, testant les limites de structures pop classiques. C'est en ça qu'ils réussissent, dans cette capacité à expérimenter tout en restant fondamentalement abordable, allant au final dans le même sens que les Beatles sur l'album blanc, c'est à dire en avant, mais beaucoup plus loin, en prenant comme parti pris de toujours privilégier les mélodies. Et donc, au final, Deerhoof sonne très classique et en même temps comme aucun autre groupe. C'est un groupe qui pourrait etre défini par une série de "Et si... ?", la possibilité d'une dimension parallèle dont eux seuls auraient les clés (ou une "Wrong Time Capsule"), où les années 90 n'auraient jamais existé. Une sorte de post-punk d'une autre dimension, un autre Devo qui serait le même mais pas le même. En gros. Regardez un épisode de Sliders si c'est pas clair.

Et sur scène ils s'amusent sincèrement, posent, empruntant autant aux no-waveux qu'aux groupes de stade, font sourire presque tout le monde, et jouent comme peu d'autres. La base du groupe c'est Greg Saunier, batteur incroyable, qui avec une caisse claire, une grosse caisse et une cymbale fous les boules à, euh, tous les autres batteurs. Son jeu touche au génie, il se dit très influencé par Keith Moon et ça se sent dans le sens où il propulse le reste du groupe en en mettant partout, mais bien. Ce qu'il fait peut paraitre chaotique au premier abord, mais a un sens évident pour lui et pour les autres et au final, pour nous. C'est assez magique et difficilement explicable. Saunier et John Dietrich (guitare) forment un duo de vieux étudiants timides et bourrés de tics, le genre de gars qu'on imagine très bien faire une compète de rubik cube dans un coin pendant que tout le monde est nu dans la piscine. Là dessus déboule de manière assez formidable Satomi Matsuzaki, bassiste bondissante et chanteuse énigmatique qui apporte une touche de fraicheur et des paroles moitié naïves moitié insensées et contribue pour beaucoup à l'identité que le groupe s'est créée au fil des années (voir paragraphe précédent). Le tout est complété par le charisme ensoleillé d'Ed Rodriguez, guitariste-showman souriant, qui semble ne jamais en revenir d'être là (ce qui est également génial), plein de patate et de panache.

Super concert donc, j'ai rarement vu un groupe arriver à autant communiquer son enthousiasme sans tomber dans le spectacle pur (ce qu'il ne faut pas faire. jamais). On se réveille le lendemain en se demandant si on a bien vu ce qu'on a cru avoir vu, ou si nos méninges se sont encore jouées de nous.

Concert organisé par Hiero Colmar.

Deerhoof: http://deerhoof.killrockstars.com

dimanche 2 mai 2010

HEALTH @Trinitaires, Metz

16/04/2010


Sur disque, je n'ai jamais vraiment été complètement conquis par HEALTH, par moment trop obtus pour pouvoir complètement m'accrocher. Leur second disque, Get Color, laissait entrapercevoir (notamment par le biais de l'incroyable "Die Slow", tube bulldozer imparable) une facette plus mélodique, une canalisation de toute cette énergie noise vers des structures plus immédiatement fédératrices -des chansons. Et c'est, en gros, ce que les Californiens ont démontré à Metz ce frais soir d'avril, pour mon plus grand plaisir.

Là où, sur disque au bout d'un moment on peut arriver à se lasser ou à être agacés, sur scène leur musique prend une toute autre dimension, qui joue sur le volume et les fréquences (j'ai rarement eu l'impression "d'entrer" à ce point dans le mix), la performance elle-même ("ah c'est lui qui fait ce son là") et le ressenti physique (ton corps tremble). Ils jouent très fort, le batteur cogne comme un capitaine caverne disco, ils ont un demi camion de pédales et sautillent, le regard trop là ou complètement ailleurs, en appliquant une sorte de formule où le minimalisme (on a l'impression que chaque musicien joue le minimum de notes possible pour que les morceaux tiennent en place) rencontre un travail assez incroyable des textures et du son.

L'entrée en matière a été très brute, presque déstabilisante -ils prennent personne par la main- et les morceaux ont gagné en mélodie au fil du set, court (une petite cinquantaine de minutes) mais complètement bouleversant. Ils ont surtout pioché dans Get Color, faisant monter la tension jusqu'au duo gagnant Die Slow/We Are Water et terminé avec deux nouveaux morceaux, l'un très calme, avec une ligne de basse toute simple mais physiquement incroyable, et "USA Boys", tube en puissance, qui laissent entrevoir une marge de progression vertigineuse.

HEALTH: http://www.myspace.com/healthmusic